Naguib: Pourquoi le choix du nom " Orelsan "?
OrelSan : Tout simplement parce qu’à la base je m'appelle Aurélien donc c’est un raccourci. Mais pour ne pas être un énième "Orel", j'ai ajouté le suffixe -san. J’aime bien le Japon, les mangas et « san », ça veut dire Monsieur en japonais, c’est une marque de respect.
Audrey : Comment as-tu commencé? Quelles sont tes influences?
OrelSan : J’ai commencé un peu comme ça, comme tout le monde. Au début, j’écoutais beaucoup de rap des années 80-90 et un jour, j’ai eu envie d’écrire mes propres textes. J’écrivais des textes dans ma chambre puis j’ai monté petit à petit.
Marie Ranieri : Tu écoutais plutôt du rap américain ou du rap français ?
OrelSan : Les deux : du rap américain et du rap français. C’est assez vaste.
Élodie : Trouves-tu de l'inspiration dans d'autres formes d'art ?
OrelSan : Oui souvent dans des films, à la télé aussi. Je sais pas si la télé est vraiment une forme d'art (rires). Aussi dans les livres, l'écriture ça reste l'écriture donc c'est important de se nourrir par des livres. Je trouve aussi mon inspiration dans la vie de tous les jours, une fois que t'as pris l'habitude d'écrire tu prends l'habitude d'analyser tout autour de toi.
Naguib : Y a-t-il des artistes avec qui tu aimerais collaborer?
OrelSan : Ouais il y a beaucoup de personnes avec qui j'aimerais collaborer : des producteurs, des rappeurs, voire des jazzmen.
Élodie : Les deux victoires de la musique obtenues récemment (meilleur album de musique urbaine et Révélation du Public) t’ont-elles ouvert des portes?
OrelSan : J'ai pas eu de coup de fil depuis, mais ça fait connaître ma musique. Ça lui donne une certaine caution, même si ça marchait déjà bien avant.
Élodie : D'un point de vue plus personnel, qu'est-ce que ces trophées représentent pour toi ?
OrelSan : Je ne fais pas de la musique pour des trophées, c'est plus pour ma famille, mes amis… Quand t'es un artiste, t'es un peu marginal, donc obtenir un trophée c'est comme un tampon qui validerait ce que tu fais pour tes proches.
Naguib : Depuis ton 1er album, on constate une évolution. Les textes sont plus "réfléchis", moins impulsifs... Qu'est-ce qui explique cette évolution?
OrelSan : En fait mon premier album racontait surtout la vie d'un jeune de 15-25 ans, les premières histoires d'amour, les premiers regards et donc avec toute la spontanéité qui accompagne la vie d'un ado. Mon deuxième album, lui, parle plus de la vie d'un homme de 25-30 ans, c'est une période qui nous arrive à tous à un moment donné, où on a le choix de se prendre en main, d'effacer toutes ces petites mauvaises habitudes. Avec « Le chant des sirènes », j'avais aussi besoin de changer de point de vue, c'est important de se renouveler, une bonne recette marche une fois, deux fois mais après il faut savoir évoluer.
Audrey : Quel est le sens du morceau « Le chant des sirènes » ?
OrelSan : Pour ce titre, j’ai pensé aux aventures d'Ulysse dans l’Odyssée où il est soumis à de nombreuses tentations. Comme Ulysse, j’ai aussi eu de nombreuses tentations comme la drogue, facebook, les choses qui rendent accros, qui t'empêchent d'avancer et qui auraient pu anéantir ma carrière et bien sûr mon album.
Élodie : Dans cette chanson, tu parles aussi du star système comme d’un risque...
OrelSan : Oui c'est aussi ce qui arrive dans la vie de tous les jours, quand on prend de l'ampleur. Je compare souvent ça avec le monde de l'entreprise, un petit employé qui va monter et avoir des responsabilités va vite oublier les galères de sa vie d'avant. On peut vite prendre la grosse tête, l'attention des gens autour de nous augmente, et on s'habitue facilement à un certain standing du fait de gagner plus d'argent.
Marie Ranieri : Comment tu t’en protèges justement ?
OrelSan : Je fais des trucs constants. Je suis toujours avec les mêmes personnes. Il faut savoir relativiser. C’est sûr que ça ne va pas durer éternellement. Il faut savoir prendre du recul, discuter avec les gens.
Marie Ranieri : Pourquoi avoir choisi le titre de cette chanson « Le chant des sirènes » pour le nom de l’album ? C’est toi qui l’a choisi ou la prod ?
OrelSan : C’est moi. J’aime bien que le titre de l’album soit celui qui a le plus de sens et qu’il soit très symbolique.
Audrey : Dans l'album tu abordes souvent les thèmes de la société de consommation, de la jeunesse et de la morale. Quel impact recherches-tu à avoir sur le public ?
OrelSan : Moi, je veux avant tout faire des chansons plaisantes, faire de bonnes chansons et aussi faire des chansons qui suscitent des émotions comme la joie, la tristesse. Et des chansons réalistes pour que le public réfléchisse à la société, à la jeunesse.
Marie Ranieri : Est-ce qu’on te laisse libre des choix artistiques ou la prod t’impose-t-elle certains choix ?
OrelSan : Déjà pour la prod, en fait, je suis co-produit. J’ai deux labels : 7th Magnitude avec Skread et Ablaye et 3e Bureau, qui dépend de Wagram. C’est le plus gros producteur indé. En termes de production, je fais ce que je veux de A à Z. Je me suis entouré de gens de confiance, je les écoute quand il s'agit de choisir les singles qu'on sort, c'est une question de stratégie. Je ne suis pas du tout dans un rapport de conflit avec ma maison de disque. En fait, on maîtrise tout.
Élodie : Qui est le réalisateur de ton album?
OrelSan : C’est Skread qui a composé les 3/4 des morceaux et qui a réalisé l’album. Le reste a été composé par des artistes rencontrés un peu au hasard. Moi, je m’occupe des réseaux sociaux. Je n’ai fait que la compo de « La petite marchande de porte-clefs » grâce à un logiciel. J'ai ensuite fait appel à un pianiste, et à une copine chanteuse pour les refrains en chinois.
Marie Ranieri : Que signifie le refrain en chinois de « La petite marchande de porte-clefs » ?
OrelSan : Cela dit : « Je suis seule dans le noir et j’attends. »
Marie Ranieri : Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment?
OrelSan : J’écoute beaucoup de rap américain, les classiques : Notorious B.I.G., Tupac mais aussi La Fouine.
Marie Ranieri : Nouvel R ?
OrelSan : Oui aussi ! J’ai joué avec eux d’ailleurs. J’aime beaucoup.